lundi 30 mars 2015

Jean Constantin par François Constantin


"Étonnez-moi, Benoît" est une émission hebdomadaire du samedi matin (11h / 12h30) sur France Musique, animée par Benoît Dutertre, grand amateur d'opérette.
Par ailleurs, il ne rechigne pas à aborder la chanson ou son entourage.
Le 17 janvier dernier, il recevait le fils de Jean Constantin, François, pour évoquer son sympathique dab'.
On y apprend, entre autre, que les immortelles "pantoufles" furent écrites avec Claude Nougaro.


Les allergiques à l'opérette peuvent sauter directement à la dix-neuvième minute pour une chanson dédiée aux amoureux de la langue de Voltaire et de Michel Droit.

vendredi 27 mars 2015

Toulouses en chanson (4) : émeutes en ville

Bon d'accord, Robert Piazza (du Havre) n'a jamais chanté en français mais on a eu comme une envie d'évoquer l'épisode qui a conduit à ce fameux morceau de Little Bob Story.


Ceux qui se souviennent encore de l'organisateur KCP (ou KC Productions. Que les vrais noms de ces margoulins tombent dans l'oubli ! Comptez pas sur nous pour les rappeler ici) savent donc que ces deux fumiers possédaient le quasi monopole de l'organisation des concerts dans notre beau pays dans les années 1975-1980.
Leur Service d'Ordre était composé d'un heureux mélange de brutasses, improbables rejetons entre des affreux (les mercenaires à Bob Denard) et des Gardes mobiles. La courtoisie, en moins...
Du coup, le public de la bonne ville où "même les mémés aiment la castagne" décida purement et simplement d'enfoncer la ligne de tout groupe de vigiles présents aux portes des salles et d'auto-réduire les entrées à la modique somme de zéro franc (quitte à fabriquer de faux tickets à l'occase).
Et l'on vit les prestations de groupes aussi ravageurs que Ange, Chuck Berry, Status Quo, Magma ou Léo Ferré se transformer en batailles rangées avec la cavalerie arrivée en renfort sur la place Dupuy ou en bord de Garonne (ce qui valut plus d'un plongeon à certains).
En conséquence, tourneurs et autorités locales abandonnèrent la Ville Rose à son triste sort pour plus ou moins deux ans.
Ce qui fit la bonne fortune d'une discothèque gersoise, "Le Pied" et d'une autre tarnaise, "l'Enfer", situées toutes deux dans un rayon de 40 kilomètres de la pas encore métropole.

La période évoquée dans le fanzine Nineteen spécial Toulouse en 1985
(amis myopes,  on peut cliquer sur l'image)



Un concert à la Salle de la piscine Nakache, le 27 et 28 mars 1980 avec La Souris Déglinguée, Diesel, Lili Drop, les Stilettos et l'inévitable Little Bob Story, quelques fauteuils cassés au théâtre du Taur au cours de deux soirées (Stiff Little Fingers, Lipstick) puis le recyclage d'un cinéma kung-fu / western du quartier St Cyprien, l'Éden, marqueront la fin progressive de l'ostracisme.
Même si il a tout de même mieux valu avoir un blouson bien épais pour fréquenter les concerts de rock pendant un certain temps. mais ça, c'était plutôt pour des raisons de guerres tribales et c'est une autre histoire...



mardi 24 mars 2015

Deux heures à tuer

Scénario de Bernard Dimey

 

Un film de Yvan Govar (1965) doté d'une distribution étonnante : Pierre Brasseur en flic (vraiment ?) cynique et fouineur, Michel Simon en balayeur toqué, Jean-Roger Caussimon et Catherine Sauvage en couple de grands bourgeois vicelards, sans oublier l'inoubliable Marcel Pérès en chef de gare.
L'argument est simple : une demi-douzaine de personnes attendent un train de nuit dans une gare autour de laquelle rode un maniaque tueur de femmes poursuivi par une horde de flics.
Tout ça donne un aimable suspense provincial qui se traîne quelque peu mais dont le sain principe est que personne n'est vraiment ce qu'il paraît être.  
Accompagné de quelques mots d'auteurs de Dimey : 
" Depuis que les Allemands sont partis, il n'y a plus de savoir-vivre, plus de respect. Il ne nous reste rien."
"Ah non. Il nous reste tout de même le satyre."  

 
Deux Heures a Tuer par imineo



vendredi 20 mars 2015

Variations de Lester Bangs



Lester Bangs & Co à Coney Island


    Allen Park, Michigan, USA, avril 1974 - Nous sommes tout un tas dans la Patinoire de Hockey d'Allen Park, arène suprême de ce patelin popote à regarder Bachman-Turner Overdrive faire la conquête de Cobo Hall tandis que la sueur émise par les ados se condense dans l'air, quand voilà que survient cette bande de types basanés aux nez rigolos, vêtus de paillettes et de strass, croisement improbable entre les Mille et Une Nuits et hé-man-jsuis-une-rock-star. Ils s'installent et commencent à jouer ce bizarre barattage tournoyant qui sonne comme "Jumpin' Jack Flash" avec de vrais morceaux de Joujouka dedans et, étant les vieux cyniques à lobes d'acier que nous sommes, nous nous retirons dans la loge de BTO pour écluser la bière de ces Mormons.  
    Et c'est là que, plus tard, je fais la connaissance des Variations, premier groupe de hard rock franco-marocain du monde. Ils sortent de leur concert pleins d'une gaieté nettement peu française, et se présentent tout à fait ingénument : "Salut, Lestère, je suis Alain Tobaly, voilà mon frère Marc, notre guitariste, ça c'est notre batteur Jacky Bitton, Jo Leb, qui chante, on adore l'Amérique et le rock, hé mec, t'aimes Fats Domino ?" La cerise sur le gâteau, c'est un type assez corpulent d'une quarantaine d'années, en trench-coat noir et petite moustache de maître d'hôtel genre trait de crayon ; c'est Maurice Meymon, principal maître queux du rythm'n'druze du groupe, à savoir que son oud (instrument marocain traditionnel un peu semblable à un luth en plus swinguant, popularisé ici par Ahmed-Abdul Malik) et son violon assurent le vrai bourdon arabe tourbillonnant qui est ce à quoi ils se réfèrent en appelant leur nouvel album Moroccan Roll, et ce qui leur donne la promesse d'être le premier groupe à porter le mariage de la musique orientale et du rock un vermicelle modal plus loin que le Velvet du temps de "Black Angel's Death song".
    C'est une bande hétéroclite de francaouis, excités comme des puces à l'idée de jouer dans ce puits à sueur de troisième ordre, et la star de l'heure est le bassiste Jacques "P'tit Pois" Grande. Il provoque des "aaargh !" à droite et à gauche en essayant de parler avec l'accent du Michigan, ce qui, sorti de son gosier français, évoque un Mexicain enrhumé tentant d'imiter Donald Duck. Mais le voilà préoccupé, ce qui n'est pas contre nature, de choses charnelles, m'importunant, me secouant presque par les épaules : "Ze groopeez, Lestère, wair are ze groopeez ?"
    Je temporise : " Écoute, mon gars, je n'ai pas à m'enquiquiner avec ce genre de merde. Ma copine est avec moi." Laquelle copine me jette un regard à clouer net un barracuda tandis que je conduis Jacques vers la cage aux mottes. Et il y en a bel et bien une pleine rangée contre le mur d'en face, assises sur des chaises de cafétéria, jambes croisées, fumant des cigarettes, jetant des regards approbateurs dans tous les sens comme autant de langues d'iguanes dans les forêts tropicales. Mais voilà qu'en route les yeux du pauvre Jacques s'accrochent à une des filles de Creem, d'allure très classique mais qui est accompagnée : "Ah ! Lezlee Brown, la supeeerbe Lezlee ! Je t'aime mais tu es avec un autre, qu'est-ce que je peux faire ?" Offrant son coeur en gémissant, bon dieu maintenant je comprends Charles Aznavour et aussi pourquoi ils ont perdu la guerre, mais j'essaie de lui expliquer, je l'attire dans un coin et lui dis juste au-dessus de l'oreille : " Écoute, mon gars, il y en a plein partout, alors vas-y pendant que tu en as l'occasion ! " "Oh non, j'aime Lezlee, mais elle ne m'aime pas, oh..." Leslie pouffe de rire, tout le monde dans la pièce est en plein tumulte, et je commence à adorer ces types.




    New York, mai 1974 - Je suis à New York pour l'ouverture de Mott The Hoople au Uris Theatre, à Broadway, et qui repéré-je dans le lobby, traînaillant au milieu des célébrités et des rock critics qui ont fui le concert de Queen, sinon les Variations ? C'est d'abord à Alain, le manager, de m'accueillir avec tant d'effusion que c'en est gênant : "Lester, mon ami, comment ça va, tu as l'air magnifique !" tout en me serrant dans ses bras et en m'embrassant presque en une démonstration chaleureuse bien de lui, qui attire et fait beaucoup rire les homos majoritaires dans l'assistance. Et l'important c'est que ça n'est pas du baratin, il est réellement heureux de me voir, comme les autres membres du groupe, on dirait une meute de Will Rogers francisés, ils sont si pleins d'excitation et d'affection sincère à la simple idée d'être en Amérique que les pauvres niais se baladent partout en étreignant tout le monde, ravis. Et si vous êtes jamais venus à New York, vous pouvez imaginer à quel point leur ingénuité peut paraître incongrue, et comment ils réussissent à charmer la presse rock et presque tous ceux qu'ils rencontrent. Je croise P'tit Pois (Jacques) et, bien qu'il ait à chaque bras une groupie modérément classe, les premiers mots sortis de sa bouche sont : "Est-ce que Lezlee Brown est là ?"


Portrait du rock critic aux yeux de merlan frit


     Paris, France, juillet 1974 - Bourré à l'absinthe, je suis au George V, l'un des hôtels les plus classieux du bled, m'étant frayé un chemin au-dessus de la Grande Mare pour surprendre sur leurs terres les Variations, qui sont désormais mes meilleurs amis, bien que je ne les aie toujours pas vus live, et que je n'aime guère leur nouvel album. Paris serait une cité super si on pouvait se débarrasser des gens, qui sont l'amas de bonnets de nuit le plus mort, glacé et pleurnichard que j'aie jamais vu de ma vie en un seul endroit. J'avais entendu parler de leur hostilité et de leur anti-américanisme légendaires, et j'espérais au moins voir s'agiter
une bouteille de vin au-dessus de ma tête, ou entendre "A bas la guerre au Vietnam, sale porc !" mais pas de chance. Au lieu de ça nous visitons tous les vieux bars mythiques de l'avant-garde, la Coupole, le Café de Flore, et ils sont pleins de types ternes et abattus qui passent leurs journées en discussions intenses et maussades sur les mérites comparés de Samuel Beckett et de Robbe-Grillet. Au Flore, je demande à Alain : "Comment ça se fait que tout le monde ait l'air si lugubre ?"
"C'est un bar gay, répond-il."
Je vois, tout s'explique, les vieux abreuvoirs de l'avant-garde se sont transformés en endroits où traînent de vieux pédés, sauf qu'il y a autre chose, c'est le sentiment de mornitude et de défaite étouffant, mélodramatique et typiquement français, qui vient du fait, entre autres raisons, qu'ils se la sont fait mettre dans le cul au cours des deux guerres mondiales successives. J'essaie de les agacer en hurlant "On est cernés par les beatniks !" ou "Y a-t-il un existentialiste dans la salle ?" Mais ça n'a servi à rien, ils sont tous restés assis là à mourir. J'ai commencé à m'interroger sur l'apparente contradiction entre la flamboyance généreuse de tous les membres des Variations et la misère suffocante, prétentieuse, ostentatoire qui nous entourait, mais la réponse tient peut-être au fait que les Variations sont des hybrides, des nomades, voire des gitans. Ils sont venus de la Méditerranée depuis leur Maroc natal, et ils ont été le premier groupe de rock à mettre un terme à la mainmise sur les charts français des ballades traditionnelles, entre sublime et ridicule, ou des imitations d'Elvis de troisième ordre comme Johnny Hallyday.
    Devenus célèbres pratiquement du jour au lendemain, ils ont donné aux mômes de France quelque chose à quoi se rallier, en plus de toutes les miettes d'Amérique dont ils peuvent s'emparer. Et croyez-moi, ils courent après ! Par exemple, saviez-vous qu'en France il existe un fan club Robot A. Hull (note : rédacteur à Creem) ? Mais oui, et je vais même jusqu'à m'arracher à l'absinthe pour me rendre dans une boutique de disques nommée Open Market, où on vend des trucs du genre pirates des Flamin' Groovies (cultissime là-bas), de Lou Reed (représenté avec des crocs sur la pochette), et d'une jam atroce entre Jimi Hendrix, Johnny Winter et Jim Morrison, qui ne chantait pas mais jouait de la batterie (la couverture est un classique : un crâne à la Grateful Dead, mais avec une moumoute hendrixienne, et sur la pochette, en bas à gauche, une tache de vrai sang sur chaque exemplaire !). La même boutique propose également de grosses piles de vieux numéros écornés de Creem, sans aucun doute vendus à des prix astronomiques, et la clientèle de cet établissement, comme de beaucoup d'autres du même genre, se compose d'adolescents underground qui se surnomment les Ponques, et font des choses telles que porter de grosses vestes en cuir noir, écouter de vieux albums du MC5 et lire Creem.



    C'est de ce miasme de croisements que les Variations ont émergé comme un phare impétueux, premiers flashes d'orgueil national en jeu dans le rêve rock, et c'est à l'Olympia, palace parisien du sordide, que j'ai enfin l'occasion de les voir faire leur truc. Je suis plein d'impatience et plus que prêt à voir couler un peu de sang, connaissant le légendaire hooliganisme des audiences parisiennes, qui aiment peut-être le rock, mais uniquement à titre accessoire pendant qu'elles saccagent les lieux. Les Variations en sont un peu choqués, étant des partisans de la musique pure. Comme le dit Marc : " J'adore le public en Amérique, il comprend la musique beaucoup plus qu'en France. Ici, quand tu joues, ils comprennent que dalle, ils sont venus là pour s'éclater, mais pas dans le bon sens du terme, simplement pour se briser des canettes de bière sur le crâne. Quand tu leur donnes le rythme tout va bien, mais tu ne peux rien jouer de doux ou des trucs comme ça, mais en Amérique on peut leur faire comprendre parce qu'ils sont plus cultivés musicalement."
 Les Variations leur donnent donc le rythme, Jo Leb hurle quelque chose du genre : "Je suis un singer dans un rock'n'roll band", court jusqu'à l'avant-scène puis repart en arrière. Marc évite avec soin tout ce qui est doux, moulinant des riffs qui me rappellent le genre d'échange entre Fred Smith et Wayne Kramer au sein du vieux MC5. Maurice se contente de rester là, immobile, très digne et quelque peu distant, comme il convient à son âge, tirant de son violon, à grands coups d'archet, une bande sonore pour danseuse du ventre en plein tortillement qui, on ne sait trop comment, s'adapte aux riffs stoniens de base du groupe, de la même manière que le bouzin de Roxy Music parvenait à accoupler le côté caniveau du Velvet et des sonorités euroclassiques, sans passer pour le fils bâtard idiot de Van Der Graaf Generator . Et les mômes hurlent et trépignent comme si c'était écrit dans le scenario.




    Au cours des mois qui ont suivi, les Variations ont sorti un nouvel album, un peu conceptuel (Jacques explique que c'est quand "toutes les chansons se suivent... pas de break... un peu comme Tommy"), que Marc appelle "notre autobiographie, notre jeunesse au Maroc, comment nous avons grandi en France, comment nous sommes allés en Amérique et vers le rock". Il y a eu aussi des changements de personnel, avec l'addition du claviériste Jim Morris, tandis que Jo Leb (qui m'avait dit l'année dernière : "Je ne veux pas être la star, je ne suis que le chanteur. En France les gens tenteront de te dire : "Tu es débile. Je peux faire de toi une star en six mois, si tu quittes ce groupe", mais je leur réponds d'aller se faire foutre, je ne veux pas faire partie de leur système") est parti enregistrer un album solo et tourner un film avec Catherine Deneuve. Il est remplacé par Robert Fitoussi, nom fort connu du show-biz français, né en Afrique du Nord comme le reste du groupe, qui a chanté sur Earth, l'album de Vangelis Papathanassiou, claviériste de Yes ; il a eu aussi une flopée de hits mondiaux sous son propre nom, dont "Superman Superman", n°1 au Brésil. Mais en définitive, ce ne sont pas les personnalités, ou les gimmicks musicaux (concept albums, vibrations Casbah lourdement mises en avant, etc.) qui les rendront chers aux mioches américains : c'est le même genre d'excitation pleine d'aisance qui plaît aux critiques, et qu'un groupe comme Bachman-Turner Overdrive possède aussi : c'est peut-être leur ingénuité qui les fera sortir du lot.




Lester Bangs, Killers francaouis dans un blitz transatlantique : un chronologue franco-américain
-starring les Variations-
in Fêtes sanglantes et mauvais goût, ed. Tristram, 2005,
publié originalement dans Creem, février 1975.



Nota : A signaler, pour les amoureux de Lester Bangs qu'on trouve sur la toile l'intégrale de son album avec Birdland (featuring Mickey Leigh, frère de Joey Ramone), quelques morceaux avec les Delinquents, un single Let It Blurt référencé ici, ainsi qu'une rarissime "jam atroce" avec son pote Peter Laughner ( Rocket from the Tombs, Pere Ubu) et quelques bouts d'interviews.
    Pour les bouquins, en français, ça se passe chez Tristram :






mardi 17 mars 2015

Le bateau espagnol


On avait passé l'interprétation de Philippe Léotard dans l'émission sur les transports.
Voici la version originale de cette chanson toute rimbaldienne par Léo Ferré
Il a pour l'occase un accompagnement de luxe : Paco Ibáñez (d'Aubervilliers) et Juan Cedrón (de Buenos Aires) fondateur du mythique quartet.


Fait remarquable, ce bateau farci de contrebande arbore une Madone attachée en poupe par le col. Habituellement,on exhibait une figure féminine plus ou moins érotique à la proue du navire (souvent une sirène aux seins nus). Là, au lieu de se dresser fièrement contre les flots et d’ouvrir le passage , elle suit, suspendue par le cou, passivement balancée au gré des courants et des vents.
Sans aucun doute, une provocation de l'équipage : plutôt que de placer son voyage sous protection divine, avec une statue à l’avant, il le prolonge par cette Madone qui pendouille à l’arrière.
À l'assaut des cieux, donc !

vendredi 13 mars 2015

Marie Dubas : de l'opérette au cabaret


Avec Josephine Baker (1932)
Anna-Marie Dubas (1894-1972, Paris-Paris)
Elle débute à 14 ans au théâtre de Grenelle avec une vraie popularité dans l'opérette. Mais, en 1926, quelques une de ses cordes vocales se font la malle, la privent d'une bonne partie de ses octaves.
Le musicologue Pierre Wolff lui fera tâter du folklore, puis un répertoire inspiré d'Yvette Guilbert dans des cabarets de Montmartre. Elle aura un certain bon goût dans le choix de ses auteurs (Carco, Rictus , Mac Orlan...) 



Le concept "d'artiste totale" n'existait pas, mais dans ses tours "de chant", la Marie danse, chante, joue la comédie, mime, intercale chansons réaliste et comiques, monologues, chansons folkloriques, chansons pour enfants et mélodies classiques.

En 1932, elle inaugure la formule du récital à Bruxelles puis à Paris, au Théâtre des Champs-Élysées, l'année suivante : 35 chansons, sans micro. La môme Piaf va largement s'en inspirer. Colette la vénère. Son public l'adule.
Elle crée La Charlotte prie Notre-Dame  (Jehan Rictus - 1934), "La java d'un sou" (Batell, Valray - 1935),  Mon légionnaire (R. Asso, M. Monot - 1936)...

Bannie des ondes pendant la guerre pour cause d'origines juives, elle se verra  obligée à prendre le large en Suisse pendant quatre ans alors que sa sœur et son neveu seront flingués par les nazis.

Elle remonte sur les planches en 1954 puis se retirera en 1958 à cause de la maladie de Parkinson : "J'ai payé trop cher : ce métier m'a tué".
Relativement oubliée, elle sera reprise par Édith Piaf, Patachou, Suzy Delair, Anny Cordie, Juliette Gréco, Anne Sylvestre, Sylvie Vartan, etc.
Elle a aussi deux films et six pièces de théâtre à son actif.

                                         Un de ses gros succès, 1930.




mercredi 11 mars 2015

Pieds Joints

Encore une histoire de galériens du rock

Fils de bonne famille, les Pieds Joints se sont formés en 1971 en reprenant Pink Floyd et Ten Years After.
Ils étaient Jean-Pierre Bouly (chant, guitare) Jean-Louis de la Boulaye (guitare) Samy Ayari (batterie) Dominique Doucet (claviers) 
Après une tournée tunisienne en corbillard (Si ! Grâce au batteur), ils se retrouveront derrière Vince Taylor, pour une de ses x-ième tentatives de retour sous le doux nom d'Auroch.
Ils passent au "rock en français" en 1973.

En 1977 après quelques mois d'hésitation, Jean-Louis jette l’éponge. Deux nouvelles têtes viennent faire du bruit dans la cave : le bassiste Jean-Sylvain 'Sinou' Ressaire et le batteur Jean-Claude « Aldo » Moreau. La mayonnaise prend et Pieds Joints se reforme avec ses quatre membres définitifs (JPB, DD, J-S R, J-C M).
Le premier disque, auto-produit par le groupe se fera chez Vendémiaire, petit label alternatif, avec des moyens sommaires. Un 45 T avec deux titres, « Spaghetti Rock » et « Fonce pas comme ça ».
En 1980, Pieds Joints signe un « vrai » contrat d’artiste avec Arabella-Eurodisc.
Un premier 45 T 3 titres sort à l’automne, (« Fille de député », « Le bon vieux temps », « Les méfaits du rock »), enregistré et mixé par Dominique Blanc-Francart (le frère de l'autre).
Tout est fait en trois jours. Le son "new wave" cache un titre "Le bon vieux temps" aux paroles plus subversives qu'il n'y parait.
Cette chanson a été immédiatement reprise par les BSBB de Bayonne  ("À l'époque le groupe le plus teigneux du Pays Basque nord" (Jtxo Estebarranz Guerre à l’État. Libertalia) Hélas, il n'existe pas d'enregistrement de ce groupe sauf peut-être une cassette au son approximatif.
En voici donc la version originale : suffit de cliquer.


S'ensuivra un grand gâchis. Qu'on leur laisse raconter :
Le groupe rencontre ensuite Thierry Vincent, qui a réalisé entre autres plusieurs albums de Jacques Higelin ; une relation riche, mais tumultueuse, qui aboutira à l’unique album enregistré et mixé à Flexanville en 1981.
Le groupe ne sera pas très content du résultat, mais la presse l’accueille favorablement et les ventes démarrent. La promo suit, avec de nombreux passages radio et télé chez Patrick Sabatier, Philippe Bouvard, Jean-François Kahn, Télé Monte-Carlo… Jean-François Kahn a fortement supporté PJ dès le premier 45T, qu’il passe abondamment sur France Inter et fait passer deux fois dans son émission TV « Chantez-le moi ». (Quel gloubi-boulga !)

Ces promotions, pas toujours bien ciblées, mettent souvent le groupe en porte-à-faux par rapport à son style, ses convictions et son public de concert.
 D’anciens morceaux seront réhabilités, comme « Le Loup », « Bye Bye Baader », et une nouvelle version kitch et de « Spaghetti-rock », à contre-courant de la tendance de l’époque (Téléphone, Trust, Indochine…). De nouvelles compositions suivent, avec toujours le même éclectisme qui refuse le copier-coller de textes en Français sur des vieux riffs des Stones…

On s'envoie une de leur maquettes qui serait taxée de nos jours d'apologie de terroriste : 
Bye, bye Baader

La maison de disques ne comprend plus, ou plutôt réalise que le groupe est inclassable, donc invendable. La séparation se fera en douceur, et la dissolution de Pieds Joints suivra quelques mois plus tard.
Ils se sont reformés pour un concert unique dans le Lot en 1995.
Depuis, ils ont fait un site pour mémoire. On y trouve la quasi intégralité de leurs enregistrements. Infos et photos de cet article en sont issus. Allez-y faire un tour, surtout si vous avez des "restes" (photos, enregistrements), ils sont preneurs.

lundi 9 mars 2015

Les débuts de Colette Magny

Puisqu'il était question de blues dans l'article précédent, voici la première apparition de Colette Magny dans les médias en 1963.
Grâce à ce document on constatera 
- que les Français ne sauront décidément jamais claquer des doigts à contre-temps
- que malgré son ton niaiseux, le Petit Conservatoire de Mireille a vu défiler un nombre réellement impressionnant de futurs piliers de la chanson.

 


Quant à St James infirmary, le blues interprété ici, il s'agit d'une chanson américaine dont l'origine doit remonter au moins jusqu'à la Guerre d'Indépendance. 
À la base, elle conte les tristes aventures d'un soldat qui meurt de la vérole suite à sa fréquentation assidue des bordels, ambulants ou pas.
L'incroyable réside dans le fait que cette histoire, parfaitement amorale, a donné lieu a plus de 400 versions depuis Joe Primrose ou Louis Armstrong en 1928.  
Pour le plaisir, une version du bluesman Josh White*, à mon avis une des plus belle jamais enregistrées.


* Ce pote à Leadbelly sera, lui aussi, une proie de la chasse aux rouges. Sa carrière en sera ravagée.

vendredi 6 mars 2015

Alan Lomax et la France









    De 1950 à 1959, Alan Lomax  posait ses valises, ses instruments d'enregistrements et sa science ethno-musicologique sur le vieux continent pour poursuivre son travail de collectage. Bon, faut dire aussi qu'il avait le FBI au derche... Gare aux sympathies rouges au pays de la Liberté...
     L'animal mit à profit ce léger contre-temps pour, comme à son habitude, enregistrer à tout-va : de profondes explorations en Grande-Bretagne et en Irlande, en Espagne, en Italie. On pourra entendre ces enregistrements (et bien d'autres) sur ce site. L'ensemble de 18 volumes fut édité dans la collection Columbia World Library of Folk and Primitive Music.
    Le Volume 4 est consacré au folklore de France, le pays de Voltaire et de Robert Ménard. Lomax, pour une fois, n'a pas mis les mains dans la cire lui-même, il se contente de reprendre le travail de Claudie Marcel-Dubois, en charge de la phonothèque au Musée des Arts et Traditions populaires fondé par Georges Henri Rivière.
    Ces enregistrements intéresseront les folkeux les plus endurcis : pas de joliesse, les "interprètes" sont enregistrés sur le vif. On y perd en qualité de prise de son, on y gagne en vérité ethnographique. Du Basque, du Corse, bien évidemment, mais aussi des choses plus étonnantes : tel ce Para Lou Loup, traditionnel auvergnat enregistré Rue de Lappe en ... 1952 !
    


Bref, le tout parfaitement numérisé se trouve à cette adresse.

Enfin, puisque nous en étions à parler de Lomax, nous ne serions trop vous conseiller d'aller jeter un œil au Pays où  naquit le Blues édité par les camarades Fondeurs.



mercredi 4 mars 2015

émission de mars : ça fume !

C'était avant le loi Évin, y'avait ceux qui consommaient à la chaîne...

Fallait s'y attendre ! Intoxiqués comme nous sommes, il a surtout été question de nicotine et de ses dérivés.
On constatera au passage que dans la chanson populaire des années 30, une femme qui fume est vite assimilée à une prostituée.

Bérurier Noir                           Vive le feu
Higelin                                      Je suis amoureux d'une cigarette
Mark Aryan                              Les cigarettes
Brigitte Fontaine                       Je fume
Berthe Sylva                             Du gris
Nitta-Jo                                     Du feu 
Monique Morelli                       La cigarette
Leprest                                      La gitane
Une énigme
Gainsbourg                               Les cigarillos
Éliane Embrun                          Si j'étais une cigarette
Pierre Perret                             Mourir pour du tabac
D Berreta & R de Bordeaux     La drogue
Stupeflip                                    Je fume pus d'shit
Les Marylènes                           Le beau têtard sur son cigare
Sarcloret                                   La saga des machins et des zinzins
Thiéfaine                                   113ème cigarette sans dormir
Hafed Benotman                       Pour les sinus de ma Vénus
Brassens                                    La fessée
 
Comme toujours l'émission se trouve sur le site de la radio.         

... et ceux qui poussaient à la conso.

lundi 2 mars 2015

Jehan Jonas, l'anar pornographe


Gérard Béziat né et mort à Paris (1944, 1980)
Il est apparu furtivement sur ce blog ici, dans une superbe mise en scène de Jean-Christophe Averty. 
Ouvrier à la SNCF, il va mettre à profit son temps perdu au service de la nation dans une caserne parisienne, pour débuter au terrasses des bistrots.




Enfin libre, il chante, entre autre, à "L’Écluse" et à la "Contrescarpe". Son premier disque sera issu de ce tour de chant en 1966. Il sera parrainé par ses copains Michel Simon et Suzy Chevet (du Monde Libertaire). A partir de là, malgré quelques passages radios, il restera dans cette catégorie si particulière "d'espoir", catégorie qui peut durer pendant des décennies pour certains.  Ce qui ne l'empêchera point d'écrire et de composer plus de 200 chansons et de nombreuses poésies. 
Ni d'être un habitué des galas de soutien aux anarchistes, objecteurs et insoumis ou espagnols qu'on bousille en fin de dictature ou en début de farce démocratique.   
Sa chanson la plus connue :

 

Tout ça est lisible sur internet. 
Mais c'est en lisant le numéro 9 du très recommandable Chéri Bibi qu'on comprend comment le bonhomme a survécu à toutes ces années de vaches maigres. 

C'est sous le pseudonyme de Henri de Canterneuil, qu'il écrira plus d'une vingtaine de romans pornographiques homos, hétéros, incestueux, zoophiles, etc.
Dixit, l'estimable revue, ces romans sont plutôt bien troussés et servent de tribune perverse au changement de mœurs en cours. On comprend mieux son amitié avec notre Michel Simon adoré. En voilà deux qui ont dû avoir des conversations croquignolettes !
En revanche, il conservera son nom d'état-civil comme scénariste de films X, que la commission de censure elle-même n'hésitera pas à taxer de "féministes" (ceci dit, venant de cette bande de schnoques, on peut tout craindre...)

Ayant disparu bien avant l'invention d'internet, l'association Jehan Jonas Second Souffle lui consacre un site fourni qu'on vous conseille.

dimanche 1 mars 2015

Gros Gégé king of rock


Réjouissante séquence du film "Je vous aime" de Claude Berri (1980) avec le gros Gégé accompagné par Bijou, rhabillés en glam rock pour l'occasion.
Non seulement le bougre semble vraiment se marrer mais on reste pantois devant son débit.
Son quoi ? Son flow, quoi ...


Rapport avec l'émission de lundi ?
C'est dans ce même film qu'on entend "Dieu est un fumeur de Havane" de Gainsbourg.