dimanche 30 octobre 2016

Novembre bestial

Mirza a assez mal vieilli (merci à Pop 9)
Six millions de clébards
Qui décorent nos trottoirs
En dépotoir genre patinoire
Bulldozer. Sauve qui punk (1977)

Alors qu'une partie de l'humanité crève, non comme des chiens mais réellement comme des êtres humains, de froid, de faim, de noyade, d'éclats d'obus, de maladie curable, etc, un certain nombre de "personnalités" demandent au gouvernement la création d'un secrétariat d'état à la condition animale. Quand on voit comment on traite de six millions de chômeurs, on frémit à ce qui guetterait alors les trente millions d'amis.
Et là dessus, on apprend que 58% des animaux auraient disparu en quarante ans.
Cherchant désespérément à être dans le vent, l'Herbe Tendre en remet une couche sur les animaux, bestioles à poils, à plumes et à écailles.
Ce sera lundi 7 novembre à 18h sur le 92,2 de Radio Canal Sud.

Pendant ce temps, Nino Ferrer cherche éternellement son clebs dans la Gare du Midi de Bruxelles. C'était en1965.
 

En guise de contrepoint, une aimable parodie littéraire d'époque par Suzanne Gabriello

jeudi 27 octobre 2016

L'affaire Plastic Bertand (imposture Belge)

À l'origine de cette mystification, une chanson anglaise speedée de 1978, Jet boy Jet Girl, hymne punk et homosexuel aux paroles qu'on ne signalait pas encore comme "explicites. Et pourtant, il y avait de quoi...
Ça vous rappelle quelque chose ? Attendez voir.



Là où c'était assez drôle, c'est que le groupe Elton Motello (mélange d'Elton John et d'Elvis Costello, donc) était, en soi, un gag formé de Ward (ex Punk Bastard), Brian James (ex London SS, futur Damned et Lords of the New Church), Nobby Goff et le Belge Yves Kengen à la basse. Un autre Belge, un certain Roger Jouret, en sera même batteur un temps. Et le 45 tour sort sur un label belge : Pinball.

À ce stade, le rédacteur de ces lignes se remémore s'être trouvé devant une télévision, un midi de 1978, à l'heure où la très giscardienne Danièle Gilbert officiait en grande prêtresse de l'émission pour femmes au foyer, Midi Première.
Et l'on y vit la blonde présenter (avec la moue de rigueur) "un punk" et envoyer l'énergumène nommé Plastic Bertrand faire son numéro de play-back sur un air à la con, "Ça plane pour moi".
Air à la con dont le 45 tour allait néanmoins se vendre à 950 000 exemplaires.  
Et être l'objet de plus de quarante reprise, dans le monde du rock anglo-saxon, de la chanson québecoise, du raggamuffin, de la variété, etc.

Le gag vient du fait que Plastic Bertrand n'existait pas!
Lou Deprijck, punk belge

Ce n'était qu'une image, un avatar, un personnage virtuel créé par le producteur belge Lou Deprijck, auteur de la musique pour le groupe britannique précédent qui avait décidé de s'auto-parodier en français en  faisant cette comptine stupide.
Il ne lui restait plus qu'à signer un pseudo très dans le ton keupon* du moment, ce sera "Plastic Bertrand**."
Fonctionnaire des telecom belges (faut bien croûter), le producteur farceur collaborait à pas mal de groupes depuis 1970.
Mais sur ce coup-là, le voilà dépassé par son canular et l'ampleur du succès de la scie l'oblige à faire appel au copain qui avait posé pour la pochette : Roger Jouret, ci-devant batteur des Hubble Hubble et des Elton Motello.



Les plaisanteries tirant parfois en longueur, voici notre Roger embarqué pour quatre albums et tournées de 1978 à 1981.
Le plus honorable étant qu'il n'a jamais prétendu être autre chose qu'un masque. Il a même tout avoué en 1998.
Quant au partage du magot, moment toujours délicat qui suit un beau coup, il semble ne pas avoir posé de problèmes majeur entre les complices, le "Plastic Bertrand" public et "interprète légal" avouant "Je n'ai presque pas touché d'argent, notamment parce que ce n'est pas ma voix sur le disque."
La cascade de procès qui suivront entre 2006 et 2012 sont dus à des litiges entre maison de disque et remix technos. 
Et comme la justice est juste, Lou Deprijck fut reconnu auteur par la justice du Roi ! 


* Citons par exemple, à l'époque, la BD punk de Serge Clerc "Les aventures de Roger Bismuth". Si ce nom vous rappelle quelqu'un, vous ne rêvez pas....
** Pour se moquer de Bert Bertrand, critique rock belge branché, équivalent d'un Patrick Eudeline.

mardi 25 octobre 2016

Montéro chez Duvivier, une complainte pour assassins


Malgré quelques comédies, Julien Duvivier (1896-1967) n'a jamais été un grand optimiste.
Mais avec ce film de 1956 on atteint des sommets de noirceur.
L'affaire tourne autour d'une manipulation montée contre un prospère restaurateur des Halles, propriétaire du Rendez-vous des Innocents*. Innocents, tu parles !
Cette belle humanité en prend pour son grade : Danièle Delorme en scorpion à face d'ange (elle est parfaite), Gabin en cinquantenaire courant la gisquette, Germaine Kerjean en mère fouettarde, Gérard Blain en jeunot idéaliste et naïf, Lucienne Bogaert en toxicomane abrutie, sans oublier une galerie de clients du restaurant entre goinfres, snobs, mandataires accapareurs, ricains incultes, vieux débris libidineux. Une bien belle image de ses contemporains : le seul à tirer son épingle du jeu est César, chien vengeur.
Amateurs de films cruels, à vos cassettes !
Comme on disait avant.


Comme Duvivier adorait saupoudrer ses films de chansons entêtantes (dans Pépé le Moko ou la Belle équipe, par exemple) il a écrit, pour l'occasion, une Complainte laissée à la voix de Germaine Montéro qui ouvre le film. Ce thème revient régulièrement, avec comme seule variante, une étonnante version triturée du Temps des cerises dans un moment particulièrement sordide.
Donc, La complainte des assassins, valse triste.

* Ouais, le cimetière des Innocents était situé par là au Moyen-Age. C'était certainement trop tentant pour Duvivier.

samedi 22 octobre 2016

Du côté du Chat Noir (9) Richepin et ses interprètes

Jules Massenet et Jean Richepin (1891)
On ne va pas ici retracer la carrière de Jean Richepin, (1849-1926) il occupe déjà une place conséquente, ne serait-ce que sur internet.
Journaliste, matelot, professeur, docker, il fut un pilier du Chat Noir à partir de 1881. Son œuvre la plus célèbre est sans conteste "La chanson des gueux" qui lui vallut un mois de séjour à sainte Pélagie.
Faute de goût impardonnable, en 1909, cet anarchiste de papier a fini par se présenter à L'Académie Française où il fut intronisé par Maurice Barrés (ses potes du Chat Noir, Verlaine en tête, ont dû se retourner dans leurs tombes).


Citons Octave Mirbeau à son propos : En dehors du cabotinisme dont il s’est plu à s’entourer, j’ai la plus grande estime pour le talent de M. Richepin. C’est vraiment un poète, d’un souffle superbe, et dont le lyrisme amer escalada souvent les cimes inexplorées, trop hautes pour les poumons malades de la plupart des rimailleurs parnassiens. La Chanson des gueux nous donna un art nouveau, des rythmes nouveaux, une poésie magnifique et canaille où l’âme de Lamartine transparaissait sur des lèvres crispées de voyou. 
 
Brassens, amoureux du swing et des belles lettres, l'a popularisé au temps de l'industrie du disque avec les "Oiseaux de passage".
Dont, pour rappel, voici une très honorable version par Nicolas Bacchus.

 
Mais rappelons que le poète avait d'ores et déjà été chanté par Yvette Guilbert, Polaire, Lys Gauty, Tino Rossi, et Damia et mis en musique par rien moins que Charles Gounod, Gabriel Fauré ou Emmanuel Chabrier, entre autres.
Plus récemment La chanson des gueux a été adaptée par Jean-Michel Piton. Disque plein de bonnes intentions, mais plutôt gâché par une mise en musique grandiloquente. On lui préfère celle de Tonio Gémène (ici "Voyou")



Pour compléter, voici deux interprétations fort honorables,
 "La chanson des cloches de baptême" rebaptisée "Philistins" par Brassens ici reprise par Nicole Louvier (1964).
Et Mon verre est vidé par Rémo Gary (1999)  

mercredi 19 octobre 2016

Épastrouillante et véridique histoire du Pigalle de Gascogne

En préambule, tonton Pierre Perret dans un classique des salles de garde : Adieu, fais-toi putain :



Pour introduire la stupéfiante histoire du lieu-dit "Le Poteau" à Captieux, en Gironde landaise.
D'abord promu base militaire américaine garnie de soldats Polonais, (si!) ce trou perdu au milieu des pins devint un des haut lieux des nuits du sud-ouest grâce à la multiplication de ses bars de nuit qui n'étaient que des claques assez rudimentaires.
L'étonnant ne réside pas qu'une flopée de bordels ait poussé autour d'un nid de bidasses mais que ces derniers ayant plié bagage en 1966, le Pigalle des Landes va persister à briller de tous ses feux jusqu'en...1987 !
Malgré le côté sordide de l'affaire, on sourit pas mal à l'écoute de ce documentaire d'Olivier Chaumelle et Renaud Dalmar qui fleure bon le rugby de village, les magouilles américano-polonaises, les macs bordelais et quelques petits commerçants dont on reconnaît le grand cœur, toujours près du larfeuille.
C'était à "La fabrique de l'histoire" du 20 novembre 2007.
Puisqu'il semble que ça ne veuille pas bien fonctionner, le poadcast est à ce lien.

dimanche 16 octobre 2016

Copinage et vieilleries

Après la réédition, d'un étonnant bon goût de la part des éditions La Fabrique, du texte de Louis Chevalier, Montmartre du plaisir et du crime, voilà-t-il pas que les éditions l'Insomniaque nous gâtent à leur tour.
Partageant quelques préoccupations avec l'Herbe Tendre, ils ressortent ce texte méconnu d'Émile Chautard.
Tout le détail est ci-dessous, cliquez pour agrandir l'image si c'est peu lisible.
Et puis, à votre bon cœur, camaros, faîtes péter l'artiche !
Sinon, volez-le !

 
Et puisque y'aura 16 titres revisités de luxe par des voyous plus modernes, un petit classique de Bruant à charge des amis de la maison :

 

Et une version plus conventionnelle par une chanteuse qui excellait surtout dans les reprises

vendredi 14 octobre 2016

Les zazous fort occupés

Tout le monde ne peut pas avoir été punk, teddy boy, mod ou blouson noir. 
 Cet article est un abrégé du passionnant travail de J. Blot trouvé sur le site l'histgeobox.

Dès la déclaration de guerre, le 9 septembre 1939, la Troisième République interdit bals publics et dancings. Le 20 mai 1940, en pleine offensive allemande, Georges Mandel, le ministre de l'intérieur, ordonne par décret la fermeture des salles parisiennes. Étendue bientôt à l'ensemble du territoire, cette mesure est maintenue sous Vichy dans son ambition de régénération morale de la jeunesse. Dans le même temps, la plupart des autres divertissements restent tolérés: concerts, théâtre, cinéma, manifestations sportives. C'est donc avant tout la danse, tout du moins celle pratiquée par la jeunesse des deux sexes dans les bals qui subit les foudres des autorités vichyssoises.

Après s'être assuré le contrôle des institutions culturelles, laissées entre des mains françaises, les hiérarques nazis s'emploient à donner une image accommodante de l'occupant. Dans cette optique, Goebbels entend faire de Paris la capitale du divertissement dans l'Europe occupée et s'ingénie à recréer le "gai Paris". Cabarets, music-halls, cinémas, théâtres peuvent très vite ré-ouvrir.  

Peu avant l'armistice, le chanteur Johnny Hess avait lancé en France la vogue du swing (de l'anglais to swing, balancer) dont le tempo tapageur, répétitif et excitant avait assuré le succès de titres tels que Je suis swing ou J'ai sauté la barrière, hop là. Les orchestres d'Alix Combelle, Fred Adison, Aimé Barelli ou le Hot Club de France mettent également à l'honneur cette musique originaire des États-Unis. Les concerts se multiplient, tandis que les horaires de diffusion d'émissions consacrées à cette musique augmentent fortement (de 3h50 en septembre 1940 à 35 h 20 en avril 1942 sur Radio-Paris).


Côté nazi : "Interdit de diffusion à la radio dès 1935, le jazz figurait en tête des genres proscrits (...). Fondée sur une conception manichéenne de l'art, la politique culturelle nazie opposait la tradition musicale issue du romantisme, censée exprimer la supériorité du peuple allemand, à la dégénérescence des musiques modernes et atonales, noires, juives et bolcheviques."
Or, la guerre modifie cet état de fait et le jazz fait son retour sur les ondes à partir de 1941. On ne parlait cependant plus de jazz, mais de "
musique de danse accentuée rythmiquement"! Le genre est finalement promu au rang de propagande par Goebbels avec la promotion d'une formation comme Charlie and His Orchestra "qui chantait en anglais des textes antisémites sur des standards américains."

Aux États-Unis, les zazous étaient des "pachucos"


Être zazou, c'est surtout manifester un état d'esprit ("swing") en contradiction avec celui de l'époque. La provocation, ici, consiste d'abord à se faire remarquer, mais aussi à revendiquer une américanophilie, une anglophilie, qui ne sont alors pas de mise. Amateurs de jazz, les zazous s'inspirent des modes vestimentaires américaines comme les grands carreaux du zoot suits. Les zazous portent les cheveux longs, bouffant sur le dessus de la tête par opposition aux coiffures militaires, ils arborent des vêtements trop longs à une période où le tissu est rationné. Les zazous affichent une attitude "j'm'enfoutiste", insouciante à l'égard des drames de la guerre, donc défiante aux yeux des autorités vichyssoise. Ils parlent et chantent en franglais, revendiquent le laisser-aller et l'oisiveté au moment même où la Révolution nationale de Vichy prône la régénération de la jeunesse française. 
Pour Vichy, le relèvement de la France passe par la régénération d'une jeunesse, débarrassée de cet "esprit de jouissance" si préjudiciable.

Abel Bonnard propose aux "bons jeunes" de reconnaître les "mauvais", ces "pitres gouailleurs, prétentieusement avachis et raisonneurs, coquetterie débraillée, mollesse, nature pauvre et compliquée, plaisantins de mauvais aloi, incapables de gaieté et de sérieux, ils sont le dernier reste d'une société d'individus."
Le mode de vie des zazous, - qui adorent la musique noire, s'amusent dans des bars enfumés où on écoute du jazz - se situe donc aux antipodes du moralisme du régime de Vichy et de l'austérité de l'époque. Ils suscitent donc très vite l'exaspération. Aux yeux des autorités, le zazou symbolise le jeune Français perverti par la IIIe République, sans âme, lâche, efféminé, vaguement gaulliste, anglophile et enjuivé. Le zazou représente en somme l'envers de l'idéal pétainiste.


A la faveur de l'entrée en guerre des États-Unis en décembre 1941, puis de l'accession de Pierre Laval à la tête du gouvernement en avril 1942 et des revers militaires allemands, la propagande anti-swing s'amplifie et la pression sur les zazous se fait plus hargneuse. Le mouvement devient ainsi la bête noire des autorités. L'engouement pour le swing et la persistance du phénomène zazou démontrent surtout que l'endoctrinement idéologique voulu par le régime est un échec. La renaissance nationale tant espérée par le régime se trouve très affectée par le rejet généralisé de son éthique du travail, du désintéressement, de l'austérité, de la masculinité.
Les collaborationnistes, partisans de la victoire de l'Allemagne, s'en prennent alors avec hargne et un grande violence verbale aux zazous. 

   
Une virulente campagne de presse anti-zazou s'ouvre à l'automne 1942.  Lucien Rebatet dénonce "la vague immonde du swing, ce similihot, ce vulgaire straight, cette cochonnerie assaisonnant les blues avec du sirop de grenadine dans le but d'assouvir les fringales de trémoussements des pipelettes de la rue Soufflot."


Les collaborationnistes considèrent encore les zazous comme des tire-au-flan égoïstes, des "judéo-gaullistes". Le journaliste du Parizer Zeitung lance même: "Derrière le modèle américain et anglais du swing, c'est le juif qui se cache..."
Pour l'hebdomadaire
Jeunesse, "il faut reconquérir le Quartier latin sur l'influence juive et l'imposture gaulliste." La Gerbe - qui porte décidément bien son nom - surenchérit:
"
Que l'on ne s'y trompe pas. Nous ne sommes pas contre le swing, mais contre les swings. Le swing c'est encore du jazz, [...] du jazz décadent, sans doute, mais de la musique allègre. Les swings sont une race aigrie, qui naît à quinze ans avec des trépidations politiques stupides, un cœur de vieille trompette bouchée, qui veut singer le clairon de Déroulède." [La Gerbe, 4 juin 1942]

L'organe collaborationniste Au Pilori inaugure même une rubrique Art zazou. Au fil des mois, le ton se fait de plus en plus menaçant: "Le remède le plus pratique pour se débarrasser du zazou consiste soit avec un ciseau à lui couper la veste-pardessus, soit avec une tondeuse à lui enlever le toupet, ce qui non seulement le démoralise, mais encore le prive de tous moyens d'actions.
 P. S.: puisque la jeunesse énergique paraît se rassembler sous l'étendard PPF, nous lui signalons spécialement cette chasse aux zazous." [Au Pilori, juin 1942]
 L'appel est entendu. Aux mots succèdent les coups. Une intense répression s'abat  sur les "petits swing" dont les exécutants se recrutent au sein des Jeunesses Populaires Françaises (JPF) de Jacques Doriot ou du du Rassemblement National Populaire de Marcel Déat. Leurs membres organisent des rafles dans les bars, tabassent, tondent leurs adversaires. 450 zazous sont même arrêtés par la police, conduits au camp de Drancy, puis relâchés et envoyés à la campagne pour travailler aux champs.
Quelques jeunes gens qui ont l'idée d'arborer une étoile jaune avec le mot "Swing" ou "Zazou" en gothique pour ridiculiser les mesures antisémites seront même déportés! 


Il serait abusif de compter les zazous dans les rangs de la résistance, leur comportement est d'abord une rébellion contre l'autorité parentale. Le soutien aux Alliés ou à de Gaulle n'est le fait que de quelques uns. Pour Ludivine Bantigny, "ces jeunes gens sont "des révoltés, refusant d'être étiquetés selon les normes d'identité prônées par les autorités. Ils minent de l'intérieur la morale en vigueur en exhibant ses ridicules et ses aigreurs. Au fond, les zazous sont des "déserteurs du monde", de ce monde codifié par des normes conservatrices et fascistes que, par leur refus même de cet ordre, ils entendent bien condamner." (Bantigny p 2065)
La répression et les rafles ne parvinrent pas à endiguer le phénomène zazou. C'est plutôt l'instauration du STO qui entraîne leur disparition. La Libération sonne le glas du mouvement lorsque déboulent à St-Germain-des-Près les existentialistes ou les lettristes.
Raymond Legrand, Johnny Hess seront inquiétés pour avoir continué leur activité en chantant notamment sur Radio Paris.   


mercredi 12 octobre 2016

Simone Bartel à la télévision (1960)



On aime un peu, beaucoup, passionnément, Simone Bartel, aussi est-ce une joie de relayer ce document mis en ligne par Dominique HMG.
C'était à l'émission "Discorama" du 1er juillet 1960, où elle chantait "Le bal de Meudon", paroles et musique de Claude Aubry. Pour l'occasion, elle était accompagnée de l'orchestre de Jacques Lasry.
HMG a inséré les paroles pour permettre aux internautes de suivre le propos de cette chanson qui, dixit Mac Orlan,
"Participe heureusement aux joies de la banlieue. En général, cette jeune chanteuse s'attache moins aux paysages de la rue française qu'aux paysages sentimentaux de la mélancolie. Elle sait obtenir de ce mot connu des confidences que l'amour protège plus qu'il ne détruit.

"Le bal de Meudon" est tiré du troisième 45 tours BAM de Simone Bartel, où figurent également "Comète" de Paul Villaz et une superbe "Porteuse d'eau" d'Anne Sylvestre.
Il est possible d'écouter tout ce disque sur le site consacré à la chanteuse :
http://simone.bartel.free.fr/streamer...

lundi 10 octobre 2016

Poème d'amour (Roque Dalton)

L'Humanité est un concept pour onanistes
Roque Dalton (Taberna y otros lugares. 1967)

Poème d'amour
Roque en 1963

Ceux qui ont agrandi le Canal de Panama
(À qui on a donné le "silver roll" et surtout pas le "gold roll")
Ceux qui ont réarmé la flotte du Pacifique
dans les arsenaux de Californie.
Ceux qui ont moisi dans les prisons du Guatemala,
du Mexique, du Honduras, du Nicaragua
comme voleurs, contrebandiers, escrocs,
crèves-la-faim.
("Je me permets de vous renvoyer le corps de cet individu
qui n'est qu'un vagabond suspect
aggravé du fait d'être un Salvadorien").
Celles qui ont peuplé les bars, les bordels
de tous les ports et capitales de la zone
("la Grotte bleue", "La Petite culotte" "Le Happyland")
Les semeurs de maïs en jungle étrangère,
les rois des faits divers,
ceux dont personne ne sait jamais d'où ils viennent,
les meilleurs artisans du monde,
criblés de balles en passant les frontières.
Qui sont mort de paludisme,
de piqûres de scorpions, de serpents,
dans l'enfer des bananeraies.
Ceux qui ont pleuré, ivres, à l'hymne national
sous les cyclones du Pacifique ou les neiges du Nord,
les abandonnés, les mendiants, les défoncés à la marijuana, 
les Guanacos*, fils de la Grande pute.
Ceux qui sont revenus de justesse.
Ceux qui ont eu un peu de chance.
Les éternels sans-papiers,
bons à tout faire, tout vendre, tout manger.
Les premiers à sortir la lame, 
les tristes les plus tristes du monde,
mes compatriotes,
mes frères.

Extrait du texte "La guerre est la continuation de la politique par d'autres moyens et la politique est la quintessence de l'économie" in Les histoires interdites du Petit Poucet.  
Traduction maison.

Quasiment inconnu en France, Roque Antonio Dalton** Garcia (1935-1975), poète et combattant, est l'objet d'un culte en Amérique Centrale. Il réunit la puissance du poète, l'éthique du révolutionnaire, le talent de l'humoriste, une solide réputation d'amoureux et une des morts les plus tragiques de la guerre civile salvadorienne. Ayant échappé par deux fois à la peine capitale (dont par une évasion due à un séisme), à une truie en fureur et à quelques maris jaloux, il finira fusillé par ses propres camarades le 10 mai 1975, dans la plus pure tradition des purges staliniennes. Il a été réhabilité par les mêmes quelques années plus tard. Lui qui "faisait rire les pierres" aurait certainement goûté l'ironie du sort !  


 
Cette chanson n'est pas l'hommage d'un groupe madrilène : Tio Manuel (Manuel Castillo) est l'ex guitariste des groupes parisiens Spoons, Wunderbach, Catch 22, les Outsiders et, occasionnellement la Souris Déglinguée.

* Les Salvadoriens sont "Guanacos", au même titre que les Guatémaltèques sont "Chapines" ou les Costa-ricains "Ticos".

** Il affirmait sans rire descendre d'un des frères Dalton. Bob, Grat, Bill et Emett formaient le gang Dalton, décimé à Cofeyville en 1892, qui servira de modèle à Morris.  

vendredi 7 octobre 2016

Édith on motorcycle

Édith Piaf à chanté maintes adaptations en français de chansons ayant déjà fait une belle carrière ailleurs. La plus fameuse restera sans doute "La foule", appropriation du traditionnel péruvien "Que nadie sepa mi sufrir" signé par Angel Cabral, en 1936.
Une version par Maria Dolores Pradera est visible en un simple clic.
On sait généralement moins que "L'homme à la moto" est, en fait, une reprise de Black Denim Trousers and Motorcycle Boots de Jerry Leiber et Mike Stoller,  prolifiques auteurs-compositeurs de dizaines de ballades, rhythm 'n blues, rock, qu'on avait évoqué déjà à propos des impayables Coasters.
L'original avait été enregistré en 1955 par The Cheers et était devenu le premier titre du duo placé au top ten (sixième place des ventes à l'automne 1955).
Cette chanson pour adolescents, très "cinématographique", comme il est d'usage chez Leiber & Stoller, narre les mésaventures d'un p'tit gars, motard de son état, "terreur de la Highway 101", qui néglige quelque peu sa petite amie, la loyale Mary-Lou. Évidemment le gars finit par prendre le train (dans la gueule) et les hommes du shériff ne retrouvent que ses sapes au milieu de la bouillie.
Ce titre, considéré comme la première chanson de bikers, a eu de nombreux interprètes et on ne résiste pas au plaisir de se l'envoyer par (roulements de tambour) Viiiiiiince Taylor ! Et vroum, donc !


 Jean Dréjac, auteur de l'immortel "Ah, le petit vin blanc!", s'est chargé d'une traduction assez fidèle à l'esprit de l'original pour la refiler à la Môme, qu'on n'imaginait pas vraiment s'embarquant du côté des gangs de motards. L'auteur confiera avoir été fasciné par le personnage de Brando dans L'équipée sauvage.
"L'Homme à la moto" fut chanté pour la première fois en 1956, ce qui fait d'Édith Piaf une candidate sérieuse au titre de "Alors, c'est qui a chanté le premier rock 'n roll en français?"
De Vince Taylor (la face A du 45 tour plus haut) à Nicoletta, de Brigitte Fontaine à Catherine Ribeiro, on ne compte plus les reprises de ce qui fut une des chansons les plus populaires de la Môme Piaf.
Qu'on retrouve ici, précisément le 5 août 1956, filmée à l'Olympia pour sa création du tube. 


Edith piaf - L'homme a la moto par tblogosphere

lundi 3 octobre 2016

Herbe tendre d'octobre : les fous chantés (et chantant aussi un peu...)

Titicut Follies de Frederic Wiseman (1967) pas encore à la mode
Bon ben, on s'excuse auprès de touzetoutes, un faux contact farceur a viré les trois premières minutes d'émission, c'est à dire le (pas si) nouveau générique suivi de nos commentaires. Dommage c'était le meilleur de la soirée.
Le reste, c'est pas mal d'inédits :
Alain Kan                           Les blouses blanches
Georgius                             Dorénavant
L'Empereur                        Ils finiront par m'enfermer
Brigitte Fontaine                La vache enragée
Roger Mason                      Le blues de la troisième guerre mondiale
Harry's                               C'est la voix
Énigme spéciale AA            Tutuguri, le rite du soleil noir
Jaafar                                  J'ai peur
F. Hadji Lazaro                   Serré trop fort
Alain Leprest                      Donne-moi de mes nouvelles
Collectif Astéreotypie         Air TGV
Les Colocs                          Dédé
Philippe Katrin                   Marine Le Pen
Brigitte Bardot                   C'est rigolo
Les Fatal Picards               Schyzophrène
Daniel Beretta &
Richard de Bordeaux         Psychose
Thierry Pastor                    Coup de folie

Adoncques ce reste est atteignable sur le site de la radio.
Bonne écoute !

Pour l'édification des foules, la version originale de la chanson de l'Empereur


Et la réponse immédiate de Joséphine XV :



Pour finir par le slow de l'année 1981